lundi 19 janvier 2009

Sex Hunter

Evil dead trap : voilà le film qui révéla le nom de Toshiharu Ikeda auprès des amateurs occidentaux d'horreur asiatique. Encore que... les cinéphages pervers avaient reconnu dans l'oeuvre d'insistants clins d'oeil au giallo, et ce même si Ikeda s'en défend personnellement, rejetant la responsabilité sur son scénariste, Takashi Ishii. Cependant, au milieu de ces yeux crevés fulciens et de ces découpages à la lame bleutée agrémentés de ritournelles goblinesques, une scène semble n'avoir que bien peu de rapport avec le patrimoine filmique gaijin : le viol dans la voiture. Et c'est là qu'on se rend compte que le réalisateur n'en est pas à son coup d'essai, et qu'il a commencé à tourner 8 ans auparavant des Roman Porno pour la Nikkatsu.

Son premier, Sukeban Mafia est un film très sympa, intersection entre une chronique des états de la jeunesse et le film de gangs version Toei. Variation sur des figures stéréotypées, mais tonalité personnelle. Les caractéristiques d'un bon film de genre.

Son second, adapté d'un manga de Dirty Matsumoto, Sex Hunter, est une petite bombe : une jeune ballerine (Miki) est invitée par la soeur de son ex-boyfriend (Akiko) à visiter son école privée de danse. Evidemment le tutu c'est bien, mais le sexe c'est mieux. Et ça tombe bien parce que justement le programme local mixe allègrement les pointes et la corde, le pas de deux et la partouze. D'abord contrainte à cette pédagogie abusive, le petit rat va progressivement laisser s'éveiller la féline qui sommeille.
Rien de très original de prime abord. Sauf que Ikeda met là-dedans un souffle terrible, solidement épaulé par son actrice principale, Ayako Ohta. Le métrage entier baigne dans une ambiance de folie sexuelle, construit sur le double crescendo redoutable de la libération des instincts charnels de Miki, et de la révélation des relations entre Akiko et... Le tout dans des décors qui évoquent le fantastique gothique à l'européenne, et ajoutent une touche supplémentaire à l'ambiance de déliquescence sensuelle. Le spectateur est à la fois stupéfait et emporté par les exces successifs qui se déroulent devant ses yeux, preuve d'une alchimie tout à fait réussie.

La petite histoire raconte que les exécutifs de la Nikkatsu n'auraient pas été enchantés à la vision du film, le trouvant trop généreusement doté côté porno, et pas assez côté romantique. Ils auraient alors puni Ikeda en lui confiant la réalisation de Blue Lagoon l'année suivante.
Une autre anecdote amusante concerne la désormais fameuse scène au Coca-Cola : la marque de soda faisait déjà une apparition dans Sukeban Mafia. Une fille y était punie par une mère maquerelle, et entre autres violée à l'aide d'une bouteille de la célèbre boisson... vide.

Sex Hunter est à classer parmi les meilleurs représentants de la catégorie roman porno gratiné. Ce n'est pas celui qu'on choisirait pour faire découvrir les nuances subtiles de l'érotisme japonais à une oie blanche, mais les spectateurs avertis devraient se délecter.

Sex Hunter, Toshiharu Ikeda, 1980 :