vendredi 28 novembre 2008

Chronique secrète 3

Maruhi: Shikijo mesu ichiba
aka Secret chronicles: she-beast market
aka Marché sexuel des filles


Tandis que les deux premiers opus pourraient être qualifiés de films en costumes, ce troisième se déroule dans un environnement contemporain... du tournage s'entend. Dès lors, dégagé des contraintes de décors et d'accessoires qu'on imagine comme autant de limites pour un film à petit budget, Tanaka peut filmer ses personnages plus librement évoluer dans leur milieu urbain.

En l'occurence un quartier pauvre, peuplé de racoleuses, petits macs, recycleurs de préservatifs... Parmi eux vivent Tome, jeune prostituée, son frère Taneo, handicapé mental et leur mère, prostituée aussi. Le film se présente comme une chronique de leur vie et celle de leur entourage : récit de leurs stratégies et coups bas indispensables à leur survie, mais aussi portraits pétris d'une poésie rugueuse.


Sorti en France en salles en 1990, puis en VHS chez Film sans Frontières, le Marché sexuel des filles bénéficie d'une excellente réputation, et le moins qu'on puisse dire est qu'elle n'est pas volée. Tanaka livre une oeuvre qui affiche un réalisme social sans préchi-précha mais animé par des coups de boutoir de force vitale et de tragédie. Un genre d'exploit qui ne nous laissera pas de sitôt oublier les figures bouleversantes de Tome et ses compagnons d'infortune.

L'interprétation Meika Seri dans le rôle principal est estomaquante, gouailleuse et dramatique en même temps. Elle est bien accompagnée, notamment d'Akira Takahashi en julot casse-croûte et de Junko Miyashita en Fumie, novice du trottoir.

Fumie qui, au début du film demande à Tome :
"- Dites-moi... dans ce quartier, tout le monde doit se vendre ?
- Oui, même si on veut pas", répond l'interrogée. Tout est là.


La forme visuelle est comme à l'accoutumée chez Tanaka à la hauteur, c'est à dire sans faille, dans un noir et blanc contrasté, à l'exception d'une scène en couleurs vers la fin.


Le marché sexuel des filles, Noboru Tanaka,1974 :

jeudi 20 novembre 2008

Chronique secrète 2

Maruhi: joro seme jigoku
aka Secret Chronicle: prostitute torture hell
aka Hell-fated courtesan



Deuxième roman porno dédié aux Chroniques secrètes de la prostitution. C'est Noboru Tanaka qui prend les commandes, et s'éloigne de la comédie : si l'humour n'est pas absent du métrage, la tonalité générale tend au drame.
Notons que le film n'a semble-t-il pas connu d'édition occidentale sous-titrée, et que les dialogues tiennent apparemment une part non négligeable dans la narration. Et que ce n'est pas l'article dans le Sex Films de Weisser/Mihara qui lèvera le voile sur les parts restées obscures au spectateur non japophone.
Précisons aussi que les films de la "série" Secret Chronicles ne partagent aucun personnage commun, et que les évènements qu'ils racontent se situent dans des époques différentes. Là où ils se rejoignent, c'est qu'ils traitent tous du monde de la prostitution par le biais d'un personnage principal feminin bien dessiné.

La candide Oshin laisse donc la place à la fatale Osen, laquelle aurait la réputation de porter malheur à ses clients. Elle est dignement campée par l'actrice Rie Nakagawa (Love makes me wet, Woods are wet: woman's hell), aux côtés d'Akira Takahashi et de Yuri Yamashina, entre autres...
La réalisation de Tanaka brille dès l'ouverture : il s'agit d'un long plan séquence, un travelling avant et en plongée sur un chemin pavé, le générique étant inscrit sur les dalles de cette voie. Les noms arrêtent de défiler, on arrive à la rue de plaisirs que la caméra surplombe après un mouvement d'envol. Simple et élégant.
Même si la compréhension de tous les enjeux se révèle parfois hasardeuse pour qui ne comprend pas le japonais, joro seme jigoku contient largement son lot de scènes-qui-coupent-le-souffle, une intérprêtation au poil, et une réalisation classe. A partir de là, on peut supposer que l'ajout de sous-titres aurait de grandes chances de transformer cette belle réussite en oeuvre majeure.

Secret Chronicle: prostitute torture hell, Noboru Tanaka, 1973

vendredi 14 novembre 2008

Chronique secrète 1

Au cours d'une vente aux enchère de jeunes femmes, Kichitoji, "trader" de beautés en fleur pour maisons closes, fait l'acquisition d'Oshin. Celle-ci semble prometteuse sur le plan charnel aux yeux de l'entremetteur, mais sur le plan de l'intellect un léger déficit lui ferme les portes des plus prestigieux quartiers de plaisir.
Aussi Kichi place-t-il Oshin (et son meilleur et inséparable ami le taureau) dans une plus modeste maison de province. Le problème est qu'Oshin n'a pas bien saisi ce qu'on attend d'elle, la description "s'amuser et gagner de l'argent" n'ayant pas heurté son esprit naïf... les clients vont avoir des surprises.

Maruhi: joro ichiba est le premier opus d'une trilogie consacrée au monde de la prostitution. Réalisé par Chusei Sone (les suivants seront dirigés par Noboru Tanaka) il s'agit d'une comédie douce-amère bien menée qui n'évacue pas totalement la cruauté liée à la condition d'Oshin. Mention particulière à Yuko Katagiri qui interprête parfaitement l'infortunée ingénue, affichant une candeur immaculée.

On notera la musique de la bande-annonce, version nippone du lounge en vogue dans les bandes originales de films européens de la deuxième moitié de 60's et du début des 70's. Et si c'était Edda qu'on entend ici ? Bon, c'est quand même peu probable.

Secret Chronicle: prostitution market, Chusei Sone, 1972 :

mardi 4 novembre 2008

Bad karma

Dans la série appel du pied aux éditeurs, voici Yakuza Kannon Iro Jingi, aka Yakuza Goddess: Lust and Honor, oeuvre de Tatsumi Kumashiro de 1973.

C'est l'histoire de Seigen, né du cadavre de sa mère, recueilli et élevé par des moines bouddhistes. De sa rencontre on ne peut plus charnelle avec sa demi-soeur, fille de leur yakuza de père. De son abandon de la bure pour le tatouage intégral du torse. D'une passion incestueuse et d'un parcours de douleur qui mène à la démence.

Yakuza Kannon est un roman porno majeur aux accents de tragédie classique et ponctué d'éclats de violence typiques du jitsuroku. L'annonce d'une édition sous-titrée de ce petit bijou serait évidemment une excellente nouvelle.

Yakuza Goddess: Lust and Honor, Kumashiro, 1973 :

lundi 3 novembre 2008

Hit the road, Jack !

White Rose Campus : Then everybody gets raped !
Ca commence à sentir le roussi en 1982 avec ce roman porno de Koyu Ohara (quand même) sérieusement vulgos. Le prétexte ? Un trio de pervers prennent en otage un car de lycéennes en excursion, puis, après avoir fait descendre celles qu'ils ne trouvaient pas à leur goût, reprennent la route histoire de faire passer à la casserole les plus jolies dans ce rape-bus.

Au lieu d'un traitement choc, stylé et ultra violent, Koyu Ohara donne à son film des tonalités de comédie mysogine graveleuse, et ces agressions sexuelles sur autoroute prennent des allures de foire à la saucicsse. La révélation finale tente bien de remettre un peu de pathos là-dedans, mais peine perdue après ce long déballage de grossièreté.

Si la Nikkatsu livrera encore quelques grands films avant la fin de la ligne en 1988, 1982/83 sont une période charnière qui verra le début de l'effondrement de la qualité technique moyenne de leur production. A ce titre, même s'il est loin de toucher le fond, White Rose Campus laise entrevoir la fin de la récré.
Certainement pas le film de chevet des amis du petit doigt levé et de la finesse, il reste à voir par les amateurs de bis improbable et de roman porno.

Wite Rose Campus : Then everybody gets raped, Koyu Ohara, 1982 :